L’envol

Quand on met un enfant au monde, on sait qu’il n’est pas à nous. On sait que notre travail de parent consiste à lui donner toutes les clés pour qu’il puisse arriver à l’âge adulte et voler de ses propres ailes.
Forcément, les premiers mois, on s’en rend pas compte qu’un jour ils partiront : c’est un travail à 100 % H24. On en rêve d’ailleurs de leur autonomie

Puis ils grandissent, vite, très vite.
Ils tiennent assis, baragouinent quelques mots, font du quatre puis finissent par marcher.
Et là, on le sait que ces premiers pas sont les premiers d’un long chemin qui se finira pas une séparation.

Ma Zouzou, je sais qu’elle n’est pas à moi. Elle a toujours été indépendante. Moi, je suis juste sa mère. Avec l’Ours, on s’en occupe jusqu’à ce qu’elle parte, comme si on nous avait confié sa vie le temps qu’elle grandisse.
Sa naissance a été bouleversante : jamais on n’aurait pu imaginer aimer autant ce petit être.
Pourtant, j’ai repris le travail le jour de ses 3 mois. Une part de moi, une toute petite, était contente de faire autre chose que de pouponner. Les premiers mois sont particulièrement difficiles. En tête à tête avec son bébé, on n’existe plus que dans son rôle de maman. Mais les mois qui ont suivi la reprise ont été particulièrement pénibles, douloureux.

Là, après 4 délicieux mois en vase clos, c’est l’adaptation en crèche. Si j’étais plutôt confiante au début, hier mon petit coeur de maman a eu vraiment mal. Mal dans les tripes, le ventre noué. Ma Zouzou a pleuré à la crèche puis tout le long du chemin du retour à la maison. Elle est sensible, elle était fatiguée, elle n’a pas l’habitude d’être avec d’autres enfants. Je sais qu’elle ira à l’école, donc autant qu’elle se sociabilise en crèche. Je pensais m’être raisonnée mais cette nuit, mes émotions de maman m’ont rattrapée. J’ai mal dormi : je me suis dit que je n’arriverai pas à vivre un deuxième jour comme ça, puis l’école puis la fac. Que je n’étais pas assez forte. Que décidément être mère était difficile et bien ingrat. A peine on fait connaissance qu’il faut laisser son enfant dans la jungle de la vie.

Couvée, choyée, aimée, câlinée, on élève notre enfant puis un jour, sans crier gare, on doit se séparer. On doit à nouveau physiquement couper le cordon. « Je t’aime, donc je te laisse t’envoler ». Rien ne nous prépare à ça. A cette séparation. A l’indépendance de l’enfant. Lui et nous, cela ne fait presque qu’un. Puis la crèche, la maternelle, l’école. Le garder pour nous est purement égoïste et irresponsable. Elle doit devenir indépendante, petit à petit.

Aujourd’hui, je l’ai amenée à la crèche les boyaux retournés. Pourtant, elle était souriante et contente d’aller voir les « fenfants » comme elle dit. Moi, j’avais l’impression de revivre la séparation à ses 3 mois de vie. J’avais envie de pleurer mais j’ai essayé de ne rien montrer.
Ma Zouzou s’est amusée et je l’ai laissée, en croisant fort les doigts que cela se passe bien.

J’ai été faire les courses pour m’occuper l’esprit. Mais j’avais la nausée, une boule dans la gorge.
J’espèrais que tout se passe bien. J’espérais ne pas la voir pleurer.

Et finalement, en allant la chercher, mon ventre s’est dénoué, et un sourire s’est installé sur mon visage : je venais seulement de vivre son absence. Vivre le détachement d’avec mon unique enfant. Je crois que cela s’appelle l’amour maternel.
Je l’ai retrouvée, souriante, en train de coller des gomettes.

Le comble : elle ne voulait plus partir.
J’étais rassurée !
Le pire : on m’a proposé une journée entière en plus des demi-journées. Je vais pouvoir bosser ! Je vais devoir la laisser…

Malgré tout, je sais que cette séparation est nécessaire.
Et que ce n’est qu’une simple répétition de prochaines séparations…
Un jour, elle partira de la maison, pour mieux revenir : c’est tout le mal que je lui souhaite. Une part de moi passera le pas de la porte. Mais pas mon amour pour ma Zouzou.

9 réflexions sur « L’envol »

  1. Quel dur apprentissage que d’apprendre à se séparer de ses enfants !
    On nous programme pour tellement de chose les porter, les mettre au monde les faire grandir,les élever leur donner tout plein d’amour, bref, devenir aussi dépendante d’eux qu’ils le sont de nous malgré leur folle envie de s’autonomiser. Et, un jour, on prend cette cruelle option, tout petit qu’ils sont, on doit les laisser sortir de notre cocon/giron pour vaquer à notre vie de femme mais nous on est pas, voir même plus(mais alors plus du tout), programmé pour s’envoler . Dure étape de la vie de parents !

    Autre petit point non négligeable que beaucoup de personnes ne savent pas un enfant ne se sociabilise qu’au alentours de l’âge de 3 ans à partir du moment ou il interagit avec les enfants volontairement pour qu’il en résulte une action( par exemple je jeu, une conversation…)
    Ainsi un enfant avant cette phase de « maturité d’échange » ne se « sociabilisent » pas mais apprend à vivre avec les autres. Ils ne jouent pas ensemble mais ils jouent les uns à côté des autres.

    Les enfants qui sont allés en crèche, qui ont étés avec une assistante maternelle,ou qui ont étés gardé par leur parents ou autre membre de leur famille se retrouvent sur un pied d’égalité à leur entrée à la maternelle car bien souvent ce n’est qu’à partir de ce moment là qu’ils éprouvent le besoin de sortir de leur petit monde pour se tourner vers les autres.

    C’est un des nombreux thème abordé lors de la formation d’assistante maternelle que j’avais trouvé passionnant !

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    1. Pourtant quand j’entends un ami me dire qu’il a été traumatisé par la rentrée à la maternelle, je me dis que si la séparation avec sa maman avait été préparée et initiée avant, cela aurait été différent…
      Peut-être c’est pour déculpabiliser, mais je me dis que ma Zouzou est mieux avec d’autres enfants de temps en temps que seule tout le temps avec sa maman…

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  2. Très bel article!!

    On pense parfois faire des enfants pour soi, mais non, l’amour véritable, c’est aussi savoir les laisser prendre leur autonomie, même si c’est difficile…

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  3. Je suis entièrement d’accord avec toi une séparation encouragée , préparée, répétée, bien vécu est ce qu’il y a de mieux ! j’aurais aimé pour ma puce si avide de découverte et d’autonomie bénéficier de quelques demi journées en creche qu’elle profite du contact des autres
    Mais, comme je l’ai déjà dit en tant qu’ass mat je n’y ai pas droit .Mes enfants profitent du contact des autres mais avec moi dans leur entourage c’est différent.
    J’aurais voulu vivre plus de séparation d’avec elle pour vivre plus facilement ( moi pas elle ) son entrée en maternelle.
    Mais c’est comme ça et je trouve super que ta puce en bénéficie d’autant plus que comme auto-entrepreneuse tu as besoin de temps pour bosser ! gros bisous kiki et encore merci pour ta plume ( surtout ton article des vendredi intellos d’aujourd hui !) et ces réflexions qu’elle engendre ! Biz :)

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    1. oui je suis sûre,:) j’ai fais une demande dans ma commune quand ma fille avait 1 an et j’ai renouvellé l’année suivante et j’ai eu droit à du négatif à chaque fois à « cause » de mon travail mais c’est pas grave je ne suis pas en besoin, je suis là, c’était surtout à l’époque pour pouvoir me séparer d’elle un peu qu’elle puisse découvrir un nouveau monde avant l’école.D’autres personnes en avait beaucoup plus besoin que moi pour bosser. :)

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